lundi 18 décembre 2006

La Bete En Nous ( 1ere partie)

Maintenant nous savons que tout est lié dans l’univers, que nous ne portons pas le mal en nous, et que, puisque nous avons chourrer la connaissance du bien et du mal, on nous a balancés sur terre pour voir de quoi nous étions capables.
On peut dire que ça n’a pas été facile au début. Il y a eu cette sombre histoire où Caïn tue son frère Abel, tout ça parce que Dieu a préféré l’offrande d’Abel à celle de Caïn. Pourtant, Dieu avait prévenu Caïn : « Si tu n’agis pas bien, le péché, tapi à ta porte, est avide de toi. Mais toi, domine le » (Genèse, chap. 4, v. 7). Je vous accorde que le terme « péché » est un peu galvaudé de nos jours, mais dans le contexte de l’histoire, l’avertissement est clair : fait gaffe, garçon, tu vas faire une connerie ! J’aurai plutôt dit : domine-toi, à la place de « domine le », mais c’est déjà une interprétation. La seule vraie question qui reste est celle de savoir pourquoi il a fait la connerie alors qu’il était prévenu ?

Quoi qu’il en soit, la vie continue, et ça se passe tellement mal que Dieu décide de rayer l’humanité de la surface de la terre, par le biais du « déluge ». Cependant, il épargne Noé et sa famille car il était juste et intègre. Un espoir persiste, donc. Après ça, on peut imaginer que l’espèce humaine va repartir d’un bon pied…
Mais non. Ça continue : les frères se trahissent, les hommes se battent, se détruisent, volent les femmes, tuent des enfants, réduisent les autres peuples en esclavage… Décidément, l’humanité éprouve des difficultés à séparer le bien du mal, ou alors elle s’en fout. Bref, elle rame tant et si bien que Dieu, dans sa grande mansuétude, lui file un coup de pouce en lui donnant les tables de la loi, et surtout ce qu’elles contiennent : les dix commandements.
Il y a beaucoup à dire sur les dix commandements, et ça fera vraisemblablement l’objet d’une autre intervention, mais pour ce qui nous occupe, on peut dire que ce sont des guides, ou des rails, si vous préférez. Ils nous disent ce que nous devons faire ou ne pas faire, au moins dans les grandes lignes, et cela pour nous aider à faire le tri entre le bien et le mal. Et pourtant, malgré ça, nous continuons à nous entretuer dans l’indifférence générale. Alors qu’est ce qui se passe ? Sommes-nous réellement habités par le mal, comme certains se plaisent à dire ? Ou y a-t-il autre chose ?
Pour tenter de répondre à cette question, nous allons quitter le domaine biblique pour nous plonger, du bout des orteils, je vous rassure, dans la génétique.
Henri Laborit, neurologue émérite, nous explique, dans son fameux ouvrage L’Eloge de la Fuite, que les êtres vivants, en tout cas dans le règne animal, sont livrés avec une programmation de base qui vise à assurer leur «homéostasie», à savoir tout ce qu’il faut pour combler leurs besoins et permettre ainsi à leur structure, leur corps, de vivre le mieux possible le plus longtemps possible. Cette programmation se situe dans le système nerveux et peut se décomposer grosso modo en trois étapes :
_ premièrement le besoin, la sensation de manque, avec la petite lumière rouge qui s’allume dans la tête et qui pousse à l’action pour combler ce manque, exemple : j’ai faim
_ deuxièmement l’action de combler le manque, qui procure du plaisir : je mange
_troisièmement le besoin est assouvi, le manque est comblé, on éprouve alors une sensation de bien-être : je fais une petite sieste digestive.
Seulement voilà. Que se passe-t-il si, lorsqu’on a faim et qu’on trouve un steak, on tombe sur un congénère qui a faim également et qui convoite ce même steak? Il y a confrontation, puis affrontement, combat, et pour finir un gagnant, qui va partir avec le steak, et un perdant, qui va donc rester sur sa faim. Si la situation perdure avec les mêmes protagonistes, le gagnant va demander au perdant d’aller lui chercher son steak à chaque repas en échange de quoi il lui laissera ses miettes. Et paf, on se retrouve dans une échelle hiérarchique de dominance, comme ça, sans réfléchir.
Or, Henri Laborit met en valeur le fait que, biologiquement parlant, cette échelle hiérarchique de dominance n’est pas tenable : soit on est dominé, et dans ce cas, on ne peut pas faire ce que l’on veut, on subit donc une inhibition de l’action qui provoque des angoisses, lesquelles angoisses provoquent du stress qui, s’il s’inscrit dans la durée, provoque à son tour des maladies dites psychosomatiques ; soit on est dominant, on ne subit donc pas une inhibition de l’action, et on pourrait se dire que là, on est dans une situation tenable. Manque de pot, lorsqu’on est dominant, on doit sans cesse réaffirmer sa domination auprès des dominés d’une part, et auprès des autres dominants qui veulent la place d’autre part.
Cette position particulièrement instable et toujours remise en question provoque, elle aussi, des angoisses, donc du stress, et enfin des maladies psychosomatiques telles que des ulcères ou de l’hypertension artérielle stable. D’ailleurs, des expériences menées sur des rats ont montré que le dominant développaient plus de stress que le dominé.
Cette organisation se retrouve chez toutes les espèces animales qui vivent en groupe (à l’exception des insectes dont la programmation générale est plus basique et ne provoque donc pas de lutte de pouvoir à l’échelle individuelle). Or, la situation biologique devient paradoxale puisque le système nerveux, en assurant sa mission de préservation de l’être, met en jeu des pulsions qui, appliquées en communauté, développent une échelle hiérarchique de dominance qui nuit finalement à l’équilibre biologique. Donc, les réflexes qui permettent d’assurer la survie à court terme provoquent l’usure accélérée de la structure à moyen long terme. C’est le serpent qui se mord la queue, semblerait-il.
Cependant, d’après Henri Laborit, le cerveau humain a un truc en plus. Il décrit trois types de cerveau : le cerveau reptilien, qui vit dans le présent, le cerveau des mammifères, qui possède une mémoire, permet une expérience empirique, donc qui vit dans le présent et le passé, et enfin le cerveau humain, qui, en plus, a la capacité de faire des associations d’idées, et ainsi d’informer la matière, lui donner une forme, puis créer ce qu’on appelle de l’information et enfin d’imaginer l’avenir. On peur dire qu’il vit alors dans le présent, le passé et le futur. Cette capacité d’imagination permet également de prendre conscience de concepts comme l’univers, la planète, l’amour, la mort, le bien, le mal…
Ah ah ! Mais cette faculté de prise de conscience nous permet aujourd’hui d’observer ce paradoxe de notre système nerveux. Et comme nous pouvons imaginer l’avenir, n’y aurait-il pas moyen de sortir de ce cercle vicieux et de dépasser la programmation de base de notre système nerveux ?

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