dimanche 20 mai 2007

... Et Voler, C'Est Pas Beau...

On a l’habitude d’entendre et de dire qu’il faut travailler pour gagner sa vie. Cette maxime met en valeur le rapport à l’argent du travail. Elle conditionne tellement la vie au sein de notre société qu’il est nécessaire d’en tenir compte pour envisager une réorganisation du travail.
La question du travail pose alors le problème de la rémunération du travail. Car aujourd’hui, pour vivre, on a plus besoin d’argent que de travail. L’action représenté par le travail n’a plus d’autre sens que celui du revenu. La production directe des éléments nécessaires à notre vie est l’affaire de spécialistes. Nous nous contentons seulement de les acheter. Et c’est là que nous atteignons le cœur du problème : l’achat, la vente, la consommation, l’économie de marché, la société de consommation. Car la plupart des aberrations de notre vie prennent leur source dans ce fonctionnement.
On peut penser que l’objectif premier de la société de consommation était la satisfaction des besoins d’une population à grande échelle. Afin que chaque intervenant de cette organisation puisse subvenir à ses propres besoins, un bénéfice est mis en place dans le prix de chaque produit. On se retrouve alors avec des mouvements monétaires qui passent de main en main et qui permettent le bon fonctionnement du bazar.
A priori, ça a l’air pas mal. Tant qu’il s’agit de se procurer à manger, de quoi se vêtir, de quoi se loger, un beau canapé et une machine à laver à 1500 tours/minute, ça reste cohérent. Mais les besoins des êtres humains ne se situent pas tous sur des plans matériels. On a besoin d’amour, de reconnaissance, de réalisation personnelle, d’amitié, de rapports humains, bref que des trucs qui ne se trouvent pas dans le commerce.
Pourtant, dans sa frénésie commerciale, la société de consommation s’efforce de nous faire croire le contraire. L’achat de produits d’image tels que des voitures, des cosmétiques, des vêtements, voire même des chewing-gums est censé faciliter nos relations avec les autres. Mes références datent un peu, mais c’est ce qui est exprimé dans la pub de « l’effet magique d’Impuls », où une femme se voit offrir des fleurs par un homme qu’elle ne connaît pas, simplement parce que celui-ci a été subjugué par son parfum.
Chacun sait que ça ne marche pas en vrai dans la vie. Mais malgré nous, nous achetons ces conneries avec l’espoir inconscient d’atteindre un tel résultat. Et forcément, on reste sur sa faim, ne comblant pas ses besoins réels et passant à côté de soi-même.
Aujourd’hui, cette façon de vivre a tellement imprégné nos mœurs qu’il paraît normal de payer chaque chose de la vie. Même si la rémunération du travail reste pour une part un moyen de subvenir à ses besoins, elle est surtout devenue l’instrument de la circulation des flux financiers.
Or, une grande part de ces flux est captée sous forme de bénéfices par les propriétaires des grandes entreprises et les hommes politiques, assurant par-là leur richesse, donc leur puissance. Et ceux-là ne travaillent pas, ils jouent. Ils jouent à une espèce de monopoly international, dans lequel les rues, les maisons et les hôtels sont habités, dont le but est d’avoir le plus d’argent et de pouvoir possible. Certains perdent, d’autres gagnent, quittent le jeu ou y rentrent, mais aucun ne prend en considération les êtres qui peuplent leurs parties, ou alors seulement pour s’assurer leur fidélité, et sans le travail desquels ils ne seraient rien.
Il paraît donc impossible de réfléchir au problème du travail sans remettre en question la redistribution des richesses, autrement dit ce jeu. Mais comme ce sont ceux qui jouent qui orientent les directions sociales, et qu’ils ne sont pas prêt à abandonner la partie, il est peu probable qu’ils proposent une vraie solution. Pourtant, il devient urgent de faire quelque chose car ce jeu, et la production intensive qui l’alimente, épuise les ressources de la terre si bien que l’on va finir par ne plus avoir de quoi vivre.
En fait, comme dans Matrix, nous sommes des esclaves inconscients dont l’énergie et l’âme sont volées par une poignée d’individus. Mais contrairement à Matrix, nous n’évoluons pas (encore ?) dans une réalité virtuelle. Nous avons les moyens d’agir. Si nous ne pouvons pas nous soustraire à l’obligation du travail, nous pouvons au moins éviter celle de la consommation en déjouant les pièges de la vente à tout prix. Après tout, une fois que nous avons de quoi manger, de quoi dormir, et à la rigueur un certain confort, qu’il y a-t-il de plus important que les rapports humains ?

1 commentaire:

Maël a dit…

La différence à mon sens dans la perception du travail aujourd'hui par rapport à il y a un siècle ou deux est celle-ci:

Auparavant, il fallait travailler pour manger, tout simplement. Que ce soit dans sa ferme, au fournil ou où que ce soit ailleurs. Là était la préoccupation première de la plupart des gens.

Aujourd'hui, l'état-providence fait que même si tu n'as pas de travail, tu peux quand même manger dans la plupart des cas. Mais comme il faut tout de même que ceux qui n'ont pas besoin d'accomplissement personnel particulier continuent à nourrir un petit attrait pour le travail, on lie de plus en plus celui-ci à l'argent.
Et surtout, on lie l'argent au bonheur, au luxe, à la joie de posséder et de jouir d'une foultitude de biens matériels qui amélioreront nos relations humaines, notre gloire et notre position sociale.
Tout cela n'est pas nouveau mais ne concernait auparavant qu'une élite bourgeoise et aristocratique qui se bagarrait souvent en huis clos pour atteindre davantage de prestige via la richesse.
Aujourd'hui, la société de consommation a étendu le phénomène à toutes les couches de la société, en faisant rêver même les allocataires du smic. Travaille, gagne de l'argent, et tu pourras acheter, posséder et devenir quelqu'un.